22. Une ombre entre nous

Lorsque j'ouvre les yeux, je suis d'abord soulagée de constater que je suis chez moi, avec Lucian à mes côtés. En le voyant, si paisible, j'éclate en sanglots. Il ne lui faut que quelques secondes pour émerger et me prendre dans ses bras. Me caressant le dos, il murmure des paroles apaisantes. Au bout d'un moment, je parviens à me calmer assez que pour pouvoir murmurer: "Lucian, il faut que je te parle. Mais, je t'en supplie, garde moi dans tes bras."

Je commence alors mon récit, de ma première rencontre avec Rowen à notre échange de cette nuit en passant par le coffre, toujours sur l'étagère. Lorsque j'ai terminé mon récit, Lucian, silencieux, relâche son étreinte et se dégage doucement. Il se lève ensuite et s'approche du coffret. Après l'avoir fixé un long moment, il ne tourne enfin vers moi: "Pourquoi ne m'en as-tu pas parlé plus tôt? Je pensais que nous partagions tout... Enfin ce n'est pas le plus important pour le moment. Nous devons trouver un moyen pour que ce type te laisse tranquille. Du moins si c'est bien ce que tu veux?"

Je me précipite dans ses bras et me serre contre lui: "Bien sûr que c'est ce que je veux! Il n'y a jamais eu que toi, Lucian. Comme je m'en veux de ne pas t'en avoir parlé plus tôt... Je suis sincèrement désolée. Je t'en prie ne m'en veux pas: je pensais que ce n'étaient que des rêves un peu étranges... Ne me quitte pas..." Je n'ose pas bouger, attendant qu'il parle ou fasse un geste. Je ne suis pas sûre qu'il ait entendu mes derniers mots, murmurés contre sa peau.

Au bout de ce qui me semble être une éternité, il pose une main sur mon épaule et m'écarte doucement. Il me fixe intensément: "Aëslynn, il va me falloir du temps pour digérer tout ce que tu viens de me raconter. Je suis blessé que tu ne m'en aie pas parlé directement mais je ne te quitterai pas pour ça." Je ressens un immense soulagement: Lucian est vraiment un homme formidable et je ne me serais jamais pardonnée de l'avoir perdu. Je retourne m'assoir sur le lit pendant qu'il fait les cent pas dans la chambre.

"Il me semble que la personne la plus indiquée pour nous aider c'est Breena. Qu'en penses-tu?" Devant mon air interrogatif il poursuit son idée: "Breena m'a un jour expliqué que le peuple elfique dont elle fait partie est très puissant. Ses parents n'ont d'ailleurs pas compris son choix de vouloir vivre auprès des humains mais ils l'ont soutenue. Je pense qu'ils pourraient peut-être nous aider à trouver une solution pour nous débarrasser de ce... type." Son hésitation n'a duré qu'une fraction de seconde mais elle trahit la fureur qui couve en lui.